Fil rouge

Alive [IW]

Les vacances. Cela a eut cet avantage de mettre une pause. Une pause sur ce sentiment mêlant tristesse, colère, incompréhension et déni. En réalité cela se limitait à un frisson, à rentrer ma tête dans mon manteau et mes épaules, à accélérer le pas, lancer un énième regard vers le chaos et à me tenir aussi loin que possible de cette scène macabre en attendant mon bus, qui me délivre de cet espace hors temps.

La veille je m’étais pris la tête avec mon meilleur ami. Je ne sais même plus à quel sujet, sans doute les éternels espoirs de ma part que je puisse le sortir de son gouffre. J’ai donc eu un mal de chien à dormir. Et ça m’a sauvé. C’est con hein. J’ai donc fini par lui envoyé ce long mail qui aurait pu être le dernier vers 2 ou 3h avant de me forcer à fermer les yeux.

Me lever pour onze heures sans réveil c’était tout à fait possible. Je me suis levé à midi. Panique à bord : j’avais un test en néerlandais ! Je ne devais pas être en retard d’autant plus que j’avais loupé les cours deux semaines de suite ! Bref je me dépêche mais étonnement quand j’y repense ma mère me retenait pour des futilités...Et là alors que j’ai ma veste attachée, mon sac sur le dos, j’entends un truc à la tv et je reste paf. C’est ce sentiment du "atta il a dit quoi le journaliste o_o" et bien il a dit "attentat à Liège". On se regarde interdit avec ma mère.

Les premières infos parlaient de grenades DANS le palais de justice alors les risques ne semblent pas trop grand , puis bon le palais de justice c’est triste mais encore "compréhensible" et moi j’ai un test donc je m’arrêterais un arrêt avant et je passerais plus loin pour éviter cet endroit et si danger il y a encore les bus n’iront pas CQFD

Mon bus m’est passé sous le nez, j’étais à l’heure, il était 4minutes trop tôt. Tant pis je marche chercher un autre à une demi heure de chez moi. Un pote de France m’appelle, paniqué et moi je le rassure parce que c’est vrai quoi je suis pas en ville et je n’ai rien, pas une égratignure donc vala. Arrêts reportés...Bah décidément je commence à douter d’aller en ville parce que là j’ai beau pas croire aux signes etc y a tout qui se met contre moi… J’arrive enfin à un arrêt où des bus passent et là forcé : je regarde sur mon gsm facebook. Mon sang ne fait qu’un tour.

Attendez 2 secondes. Les arrêts de bus ? Les grenades c’était sur les arrêts de bus ? Rien qu’en y repensant j’ai ce frisson d’effroi qui me remonte. Je suis resté con comme ça sous la pluie sans comprendre. Je rêvais forcé ! Cela ne pouvait pas être vrai ! Autant dire qu’avec les rumeurs de plusieurs tueurs je suis remonté chez moi, pale comme un mort et avec ce sentiment du "j’aurais du être là à cette heure là ce sont mes arrêts qui sont détruits, les ambulances sur les photos ce sont sur mes arrêts" et ça tournoie en boucle. Au fur et à mesure les infos arrive, je suis rassuré un instant : ceux que je connais n’ont rien.

Oui mais...ça aurait été trop facile car le soir on apprends qu’une fille de notre classe (à qui j’ai parlé une ou deux fois mais bon) est dans un sale état. Mon sang est glacé. Elle a dut se faire opérer aux deux mains, a des éclats de grenade et de verre dans le thorax et une hémorragie interne. Je sais pas vous mais moi je suis resté con devant mon pc et j’ai commencé à me noyé dans le flux d’information, jouant à Borderlands sur ps3 et dégommant tout alors que j’étais si nul.

Le lendemain je voulais aller en cours, voir les autres vivants toussa… On a tous des têtes de morts. Même dans le bus nous amenant en ville : même les personnes de couleur semblaient pâle comme la mort. Impressionnant. La ville morte, sans bruit… a part les chuchotement sur ce qu’il s’est passé. Le cours. Risible. La prof n’était pas au courant pour notre camarade, la pauvre, et moi ma phrase fastoche en anglais ressemblait a rien dans aucune langue sauf p-e a du fourchelang. Certains m’ont d’ailleurs regardé du genre "atta comment t’as fait un tel mélange ?" la prof a fait mine de rien et ils ont fini par faire une tournante dans ceux de l’autre fac qui était moins traumatisée.

Le soir je devais retourner sur les lieux des faits. J’avais pris deux roses. Une pour moi et une pour mon jumeau disparu avant ma naissance. C’est con mais cela me semblait important. Je les ai déposés en évitant les journalistes et les caméras (en même temps y en avait de partout) et j’ai été me caler aussi loin que possible des arrêts. Arrêts que j’ai fixé.

Je n’ai pas put m’empêcher d’imaginer les grenades tomber, les vitres exploser, les gens hurler et courir, saigner. Et de me voir cribler d’éclats de grenades et d’éclats de verres… Je n’aurais
probablement pas survécu

Mais je suis là. Et je compte bien le rester.

Oui j’ai peut être une résolution pour 2012 : profiter de la vie même si elle est parfois pourrie et aussi aider mon meilleur ami mais ça c’est une autre histoire.

Eh bien j’en avais des choses à dire finalement o_o

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